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44 – Papeete – Suite

  • Photo du rédacteur: Jo et Jo
    Jo et Jo
  • 24 avr. 2021
  • 11 min de lecture

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Revenir à Papeete, c’est renouer avec une vie sociale plus intense, faite de retrouvailles avec des amis constitués depuis plus de quinze mois de vie en Polynésie et l’opportunité de s’en faire d’autres.


C’est ainsi que nous retrouvons nos amis Sandie et Jean-François pour un diner à la villa Thaï, dans le centre de Papeete.


Hormis le repas qui est délicieux, ce restaurant a la particularité de circuler pieds nus en laissant les chaussures à l’entrée dans un coffre et d’être assis au niveau du sol, les jambes étant logées dans la partie inférieure du plancher.

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Le monde est si petit que, depuis notre ponton de la nouvelle capitainerie de Papeete, nous avons vu aborder juste en face de nous un catamaran avec des occupants singuliers, uniques et bien connus : Anne et Philippe sur un Lagoon 380 comme le nôtre qui bouclaient la boucle de leurs aventures polynésiennes avant de regagner la métropole.


Ce sont eux qui, de retour de France fin janvier, ont enchaîné les catastrophes depuis la récupération de leur catamaran au chantier naval de Apataki, aux Tuamotu.


Frappés par la ciguatera - appelée aussi la gratte - en mangeant du poisson de lagon infecté, ils ont été très affaiblis. Cette maladie laisse longtemps des séquelles sur les organismes.


Puis, lors de leur traversée le 11 février entre Fakarava et Papeete, leur bateau a été frappé par la foudre, qui a détruit tous les appareils électroniques (navigation, transmissions VHF, éclairage, congélateur, pompe des cales, winchs, radar, alarmes) avec des effets retard sur de nombreux appareils. Une avarie et une voie d’eau d’un de leurs moteurs a endommagé ce dernier en le noyant d’eau de mer.


Arrivés de nuit au port de Papeete en pilotage par IPad et éclairage par lampe frontale, ils ont mesuré l’étendue des dégâts, le coût et le délai des réparations et ils ont décidé de jeter l’éponge, en se séparant de leur bateau, non navigable et non vendable en l’état, pour un prix sacrifié.

Ne voulant pas rentrer tout de suite, ils ont loué un bateau pour un dernier tour aux îles sous le vent avant de rentrer définitivement.


Nous avons partagé avec Anne et Philippe leurs dernières heures polynésiennes, après un dernier bain à la grande et seule plage de sable blanc du PK18 et après avoir déjeuné sur le ponton du restaurant réputé le Blue Banana à Punaauia.


Quand on a le blues et qu’on veut garder la banane, le lieu ne pouvait être mieux choisi que le Blue Banana…

Nos nouveaux voisins de l’autre côté du ponton à la marina de Papeete, Laurent et Florence, possèdent un grand catamaran de 18 mètres et vivent d’une activité de charter en période touristique. La fermeture des frontières y a mis un coup d’arrêt brutal mais les perspectives de redémarrage commencent à se faire jour.

Laurent, ancien chef d'entreprise, a une parfaite maîtrise de la voile avec plusieurs traversées océaniques. Il aime faire découvrir la voile et le bonheur de visiter les îles polynésiennes par la voie maritime, le meilleur moyen qui soit pour découvrir la Polynésie. Florence est ostéopathe de formation, installée à Huahine pendant quelques années avant de rencontrer Laurent et l’accompagner dans l’aventure. Elle pratique toujours son activité entre deux navigations.


Nous nous retrouverons chez eux pour une première soirée pour faire connaissance, suivie quelques jours plus tard d’une soirée « jeux » sur Jo&Jo.

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Jessica, notre équipière pendant les trois mois de voyage aux Marquises, nous a invités à dîner dans sa colocation.


Nous faisons la connaissance de Bernhard, son propriétaire d’origine autrichienne, qui est pilote privé et prend des cours pour devenir pilote de ligne. Le lieu est aussi habité par Aurélien et Alice. Marie, la compagne d’Aurélien et Mika un ami de Bernhard, participeront également à la soirée.


Ce fare (maison) permet à ce petit monde de vivre en partageant les espaces communs, dans un quartier calme près de la résidence du Président de la Polynésie.


Jessica avait préparé deux plats de tartiflette qui, comme chacun le sait, est un plat typique de Tahiti…


Nous prenons rendez-vous avec Bernhard pour un survol de Moorea la semaine suivante à l’aube avec son petit Cessna, mais une pluie torrentielle et tropicale la veille et la couche nuageuse du matin reporteront ce projet à une autre date.

Dans le registre des activités culturelles, nous assistons à un concert à la maison de la culture de Papeete.

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Le groupe Pepena, que nous avions découvert aux 3 Brasseurs, propose deux heures de leur propre répertoire, à base de musiques contemporaines pop-rock aux racines polynésiennes.


Pepena signifie la création en marquisien, et a été créé en 2010 à Tahiti.


Le groupe a plus de 300 concerts live à son actif.


Présent régulièrement dans de nombreux clubs et bars de Polynésie, il s’est produit aux îles Cook, aux Marquises, en Nouvelle Zélande, au Japon, aux Etats-Unis et en France lors de deux tournées d’été.


Formé des 4 amis historiques, le groupe s’était renforcé de 3 autres musiciens pour ce concert unique, dans une salle où les mesures barrières ne proposaient qu’une place sur deux, ce qui est au final assez confortable.

Le groupe a atteint la notoriété grâce à quelques tubes dont « Fa’afaite » qui a fait l’objet d’un clip que l’on vous laisse découvrir, dans une ambiance marquisienne de danse amoureuse représentant les combats de coqs très prisés en Polynésie.


A remarquer la flute nasale, dont l’air provient d’une seule narine, autre spécialité du fenua… Flûte, même dans le monde de la musique, on trouve des gars de la narine…


Revenir à Papeete, notre port d’attache, c’est avoir l’opportunité du grand nettoyage de printemps pour Jo&Jo de retour de sa campagne des Marquises.


Cela reste très modéré et sans commune mesure avec le grand carénage qui rythme la vie des bateaux confrontés au quotidien aux agressions du milieu marin.


L’air salin et l’eau salée sont de redoutables prédateurs pour les structures métalliques, pour les pièces en mouvement et le soleil décolore toute matière textile et la rend cassante.

Notre gros bébé de 8 tonnes affiche, du haut de ses presque 14 ans, un bulletin de santé très convenable. Depuis sa mise à l’eau en juillet 2007, il aura parcouru 34.100 miles (soit 63.000 kilomètres) et ses moteurs auront tourné chacun plus de 3670 heures.


Ces bons gros moteurs diesel Volvo de 3 cylindres et 30 chevaux sont d’une technologie simple et facile à entretenir. Hormis la vidange toutes les 200 heures de fonctionnement et le changement des filtres à gasoil, d’eau de mer et de liquide de refroidissement, il y a les petits travaux réguliers comme le changement de l’impeller, la pompe à eau de mer ou le nettoyage des durites qui ont tendance à se calaminer.


Le moteur babord nous donnant quelques soucis de baisse de régime, nous avons fini par démonter entièrement l’échangeur de température qui régit le refroidissement entre l’eau de mer pompée depuis la jupe arrière et le circuit de liquide qui tourne en circuit fermé depuis le vase d’expansion. C’était particulièrement sale au niveau des tubulures et les dépôts encrassaient l’échangeur et faisaient étouffer régulièrement le moteur. Des astuces de marins, glanées aux Marquises, ont parachevé la réparation, en faisant tremper le coude d’échappement en fonte d’aluminium dans du vinaigre industriel à 14 degrés porté à ébullition. Rien de tel pour dissoudre l’alumine déposée à l’intérieur du coude inaccessible par des moyens mécaniques.


Le moteur tribord nous a fait son lot de soucis en chauffant soudainement en pleine mer, vidant tout le liquide de refroidissement dans la cale. Le diagnostic était simple : le thermostat - ou calorstat - était défectueux et n’envoyait plus le signal dès qu’il atteint les 90 degrés pour forcer le circuit de refroidissement. Avec un bidon de produit en réserve et un bricolage du thermostat, tout est rentré dans l’ordre. Un tel appareil n’a de sens que dans les zones froides ou tempérées. Il n’y a aucune nécessité de fabriquer du chaud pour alimenter un quelconque chauffage en Polynésie (nous avons pour autant un chauffage sur le bateau mais il n’a jamais servi).


Pour la vidange, il est bien sûr hors de question de passer sous le bateau et de dévisser le bouchon de vidange depuis une fosse. Il faut donc pomper au moyen d’une petite pompe manuelle et récupérer les huiles usagées afin de les déposer dans un lieu adapté à leur recyclage.


Le guindeau, ce treuil si utile pour remonter l’ancre et les dizaines de mètres de chaine nous en aura fait voir de toutes les couleurs. Installé dans un logement exigu, son accès n’est pas évident, surtout pour démonter et remonter les charbons situés dans sa partie inférieure.


On peut maintenant le démonter les yeux fermés et chaque pièce est parfaitement connue. Il fait son âge lui aussi et le rotor est usé par des années de service, perdant plus d’un millimètre de diamètre à la suite du frottement de quatre malheureux charbons qui ne sont jamais que de grosses mines de crayon, de graphite pour être précis.

« Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage » et fort de cet adage « je l’aurai un jour, je l’aurai », la résistance du moteur du guindeau aura fini par céder face à l’opiniâtreté du capitaine qui, après une bordée de jurons dignes du capitaine Haddock, lui a donné quelques heures de vie supplémentaire et économisé de nombreux euros dans le même temps.


La pompe de douche avait elle aussi fait valoir son droit de retrait, sans préavis. Les ingénieurs - on les maudit souvent pour l’absurde de leur inventions et l’inaccessibilité en cas de maintenance - ont prévu une vis sans fin en acier faisant tourner une roue crantée en plastique.


Autant dire qu’au moindre blocage de la roue, la vis continue de tourner et usine allègrement les dents de l’engrenage en plastique, rendant le dispositif inopérant et non réparable.


On avait pu faire une réparation de fortune avec une pompe moins performante utilisée pour laver la baille à mouillage lors d’une de nos haltes.


Nous avons trouvé à Papeete la pompe ad hoc - pas celle du capitaine - pour remplacer la pompe par le bon modèle.


Le winch, cette poupée verticale qui sert à enrouler et tirer sur les cordages fonctionne soit à la manivelle, soit - ce qui est plus confortable - de manière électrique grâce à deux contacteurs de pieds.


Celui de la vitesse rapide nous avait lâché en mer. Le problème ne venait ni du contacteur ni du winch lui-même mais du relais électrique. Petite révision, là encore dans un recoin de coffre au-dessus de la table à cartes, vérification des contacts et le problème a été résolu.


Dans le genre panne incompréhensible, nous avons eu droit au réfrigérateur qui affichait la température délirante de 70 degrés, par défaut de la sonde et faisait de ce fait tourner le compresseur en permanence, glaçant la partie arrière du meuble sans qu’on puisse y remédier.

La chance a fait qu’un voisin de ponton avait la visite de deux frigoristes pour un problème analogue. Venus pour confirmer le diagnostic, ils régleront le problème en changeant la sonde, non sans quelques contorsions acrobatiques pour passer le câble dans les coffres de Jo&Jo. Là encore, problème réglé à moindre coût.

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Finalement, on s’en tire très bien et à peu de frais. Il n’est que d’écouter « radio pontons » pour comprendre que le marin passe beaucoup de temps un tournevis à la main, entre autres outils de sa panoplie.


Être marin, ce n’est pas seulement connaître la navigation. Un bateau est une centrale autonome qui nécessite des talents, voir des dons de mécanicien, d’électricien, de dieseliste, de plombier, de soudeur, de menuisier, de couturier, de frigoriste, de peintre. Nous avons heureusement pour nous aider de nombreuses brochures, guides techniques et manuels d’entretien. Car, comme le disait Georges Brassens « sans technique, un don n’est rien qu’une sale manie ».


Il y aussi les aménagements de confort, voire de luxe, sur ce Jo&Jo que Timothée, notre petit-fils, appelle un « bateau-maison ».


Notre annexe avait subi quelques agressions de quais en béton agressifs et la toile en avait gardée quelques râpures et déchirures.

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Nous avons utilisé l’ancien modèle comme patron du nouveau et fait confectionner une nouvelle livrée d’un beau bleu.


Le moteur remis à neuf a eu droit lui aussi à sa petite protection bleue que nous avons personnalisée pour l’occasion.


Pour faire bonne mesure, il nous a aussi fallu réparer la chaine du mini-vélo pliable qui venait de jouer au "maillon faible" avec succès.


Les tables des carrés intérieur et extérieur avaient besoin d’un bon rafraichissement. Quelques ponçages et couches de vernis plus tard, elles étaient de nouveau dans un état comme neuf ou presque.

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Enfin, une touche de décoration est venue parachever le toilettage de Jo&Jo. La coursive babord a reçu le tapa - toile végétale frappée à la main et peinte de motifs marquisiens - acheté à Fatu Hiva.


Les lithographies d’un artiste connu de Tahiti viennent rappeler dans notre chambre notre passage aux Marquises.

Les objets achetés dans les îles sont venus compléter la collection de souvenirs exposée dans le carré : le tiki de Hiva Oa, la tortue en pierre fleurie de Ua Pou venant rejoindre les dauphins Jo et Jo et la petite vahiné dansante…

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Nous nous apprêtons à quitter Papeete. Le bateau est prêt pour affronter les prochains mois.


Après notre deuxième injection du Pfizer, nous sommes parés à toute éventualité en vue de notre retour en métropole, pour peu que les consignes nous autorisent à dépasser les 10 km de rayon d’autonomie…


Cette configuration de frontières fermées nous avait poussés à visiter les Marquises et c’est là que nous avions fait de nombreuses rencontres, avec des gens du cru bien sûr mais aussi d’autres voileux que nous retrouvions d’île en île comme voisins de mouillage.


C’est notamment le cas de Joan et Marie-Laure que nous avions croisé à maintes reprises, au point que leur compagnie nous était devenue familière, sans que nous allions plus loin dans la découverte de l’autre.


C’est en les croisant sur le ponton de la marina de Papeete que nous est naturellement venue l’idée de partager un apéritif sur Jo&Jo pour échanger nos impressions sur notre aventure parallèle.


Le contact est si bien passé que nous avons été invités le surlendemain à l’anniversaire de Marie-Laure qui fêtait ses 33 ans en compagnie d’une trentaine d’invités.

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Nous avons donc différé notre départ d’un jour pour honorer nos hôtes dans leur superbe maison sur les hauteurs de Punaauia.


Certes, nous avons contribué à élever la moyenne d’âge de cette sympathique et jeune compagnie.


Nous avons passé un délicieux après-midi entre collègues de Marie-Laure qui est infirmière, collègues de Joan qui est skipper sur des bateaux de croisières ou tout simplement d’amis du couple.

Notre charmante hôtesse passait de petit groupe en petit groupe avec un mot pour chacun, pendant l’apéritif et le barbecue avant de souffler ses bougies sur sa terrasse.


On avait envie de la voir se poser un peu, et Edith Piaf n’aurait pas renié ce bon mot : « Allez, venez, Marie-Laure, vous asseoir à ma table… »


Aux Marquises, nous avions également rencontré Lakhdar, qui accompagnait Jean-Michel, le joueur d’accordéon (voir notre blog numéro 39) lors de notre balade à Hapatoni, puis nous l’avions croisé à nouveau à Nuku Hiva et Ua Pou.


Retrouvé dans la marina à notre retour à Papeete, nous avons partagé une bière sur le bateau avant de conclure une traversée ensemble depuis Moorea jusqu’à Huahine.

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Lakhdar, d’origine tunisienne, est un ancien militaire de la Légion Etrangère ayant bourlingué un peu partout dans le monde.


Hormis les tatouages polynésiens dont il s’est acquitté comme un peu tout le monde ici, il possède depuis toujours au niveau du cœur un « tatouage de premier secours » indiquant son matricule dans l’armée et son groupe sanguin. Un excellent moyen d’être identifié et sauvé à temps en cas de problème grave.

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Nous naviguons de la baie d’Opunohu à Moorea jusqu’à Huahine, par une nuit de demi-lune chargée de nuages dont certains viendront se vider sur Jo&Jo, avec leur lot de vents tournants et amplifiés rendant la traversée peu agréable.


Au matin, nous arrivons dans le lagon de Huahine où nous faisons une halte pour lui montrer l’aquarium de Port Bourayne.

Nous rejoignons la baie d’Avea au sud de l’île en naviguant au moteur, suivis par un rameur sur son va’a profitant de l’aspiration du bateau filant à plus de 5 nœuds.

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Après quelques mois passés en Polynésie, Lakhdar rentrera en France le 22 avril.

Il a le projet de monter une maison d’hôtes dans le sud de la France, de type « bed and breakfast ».


Nous avons pu constater que les tâches ménagères ne l’effrayaient pas, dans son aide apportée dans le carré lors de son court séjour.


Il nous quitte non sans avoir sacrifié au rituel du livre d’or, en prenant le bateau Aremiti 5 qui fait la navette rapide entre les îles depuis le 26 mars et met maintenant à Huahine à 3h30 de Papeete, à un prix deux fois moins cher que l’avion qui avait jusque-là le monopole.

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Nous restons suspendus aux nouvelles de métropole pour envisager un retour prochain au mois de mai, en surveillant l’alignement des planètes de l’ouverture des frontières aux touristes sans motifs impérieux en Polynésie et à la suppression de la contrainte du rayon de déplacement de 10 kilomètres en France.


Nous sommes prêts à prendre notre billet d’avion et à laisser Jo&Jo en « hivernage » à Huahine - terme consacré dans le milieu marin - très loin de la réalité météorologique de l’outremer…


 
 
 

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