21 – La fin du confinement
- Jo et Jo

- 5 juin 2020
- 6 min de lecture
Le lundi 20 avril, un déconfinement progressif a été mis en œuvre sur l’ensemble des îles sauf Tahiti. Deux mois sans le moindre cas déclaré aux îles sous le vent, elles-mêmes exemptes de tout flux entrant ou sortant de personnes, justifiaient un assouplissement important. Le 21 mai, c’est toute la Polynésie qui était entièrement déconfinée.
Si la vie a repris doucement un semblant de cours normal, il reste de profondes séquelles. Les îles qui vivent du tourisme sont complètement sinistrées et le pays vit dans une autarcie stricte. La Polynésie a quasi fermé ses frontières, les rares avions ne viennent que de France avec des rapatriés sanitaires et du fret médical. Des mesures de quatorzaine pour tout entrant sont obligatoires à ce jour.
Nous avons profité de cette liberté retrouvée pour, sur la proposition de Nadine, notre professeure de fitness, passer une journée en pirogue pour visiter Huahine Iti, l’île sud.
Notre guide, William, est venu nous chercher avec sa pirogue pavoisée de feuilles de palmiers et de fleurs. La capacité n’étant que de 7 places, nous étions - outre Nadine - 3 couples de la danse : Fabienne et Jean-Christophe, Joséphine et son mari Eric et nous deux.
Embarquant au nord du village de Parea, nous poursuivons jusqu’à la baie de Maroe, un lieu abrité après la passe du même nom à l’est de l’île, où viennent mouiller les paquebots mais qui accueillent surtout les baleines et leurs petits à partir d’octobre.
Ici, la nature est totalement préservée, il n’y a pas de chemin le long du littoral et cet endroit a donné son surnom à l’île toute entière : « Sauvage Huahine »…

Nous passons devant le « Motu Obama » (en fait le motu Topati, rebaptisé ainsi par les locaux), un magnifique ilot paradisiaque où le président américain est venu passer quelques jours en avril 2017, pendant son périple d’un mois en Polynésie.
Si on prend en compte le fait qu’il soit venu à l’Isle sur la Sorgue l’été dernier, il n’y a qu’un pas pour en déduire - au bas mot, yes we can - que nous avons visiblement les mêmes goûts (mais certainement pas le même budget) …
Nous traversons le pont qui sépare la grande île du nord (Huahine Nui) de celle du sud (Huahine Iti) pour faire une halte de snorkeling devant un ilot réputé pour ses nombreux poissons. Nous n’avons pas été déçus. Outre les milliers de poissons bagnards, chirurgiens, perroquets, attirés par les miettes de pain et les morceaux de banane, nous avons pu apercevoir quelques poissons napoléon, sans doute prévenus de la présence de Joséphine parmi nous…
William a apporté des noix de coco à boire et nous gratifie d’une aubade au yukulélé.

Le jus de coco est frais et désaltérant mais la sacro-sainte bière Hinano fait vite valoir ses droits avant de reprendre la route vers le sud de l’île.
Le temps est idéal pour naviguer sur le lagon qui offre à perte de vue son dégradé de bleu et de vert.
Arrivant sur la baie d’Avea, nous découvrons la maison de Fabienne et de Jean-Christophe. Ils ont enfin pu être livrés par container des équipements restants et s’apprêtent à déménager dans les prochains jours.
Leur maison blanche avec vue sur le lagon est toute pimpante, prête à accueillir la pendaison de crémaillère, expression symbolique ici vu qu’il n’est nul besoin de cheminée sous ces contrées. Nous sommes entrés dans l’hiver austral et les températures vont chuter de 4 degrés, passant de 31 à 27 degrés en moyenne.
Puis c’est au tour de notre bateau « Jo&Jo » de recevoir la visite de la pirogue. Il attendra notre retour en fin d’après-midi.

Nous arrivons au lieu choisi par William pour établir notre camp pour le déjeuner. C’est un endroit idyllique, une plage de carte postale, sur le motu Tarohu ou Murimahora, sur sa face est, à deux pas de la mer se brisant sur la barrière de corail.
C’est sur ce motu qu’a eu lieu la finale de la carte au trésor diffusé en avril sur France 3.
Nous débarquons les victuailles, chacun ayant apporté de quoi manger et boire. Beaucoup à manger et beaucoup à boire. Tradition française oblige et refus du sacrilège, les vins seront servis dans de vrais verres à pied, alors que pour la nourriture, des noix de cocos évidées serviront de bols et qu’on mangera avec les doigts.
William avait préparé quelques plats polynésiens arrosés de lait de coco et s’occupera du dressage de la table à base de feuilles tressées. On mangera ainsi à même le sable, à l’ombre des cocotiers, visités par quelques bernard-l’hermite intrépides.
Le lieu était propice à un reportage photos digne du calendrier Pirelli.
Soleil, mer turquoise, cocotiers, musique, pirogue traditionnelle à balancier, sable blanc et jolies filles bronzées, chacun a immortalisé l’endroit en se promettant d’y revenir.




Le 16 mai, c’est le grand jour pour le déménagement chez Fabienne et Jean-Christophe. Nous ne serons pas trop de six, avec Vaiana et Coro pour vider le container maritime et agencer la maison blanche.
Tout commence avec la découpe des scellés. Moment solennel et constat que rien ne semble cassé à première vue durant le long voyage depuis Montpellier.
Puis c’est un défilé incessant des déménageurs dans un ballet bien rôdé de charroyage et de déballage, de montage de meubles et de rangement de vaisselle, avec les cartons vides et les papiers qui s’entassent devant la maison.
Nadine nous rejoint pour le déjeuner. Fatigue et digestion aidant, Coro et Jean-Christophe s’adonnent à un repos bien mérité avant de reprendre les assemblages de meubles. Le morceau de bravoure reste le montage d’un lit double Ikea composé de 26 pages de notice en deux heures chrono.
Le 19 mai, nous sommes invités sur le voilier Aquarius, un magnifique monocoque de 48 pieds que Els et Jean-Christophe bichonnent depuis leur arrivée ici. Il faut dire qu’avec tout le bois dont il est constitué, il y a de quoi poncer, re-poncer, vernir et re-vernir, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur…
Apéritif dinatoire au coucher du soleil et prise en mains de la barre par le lieutenant Sylvie, dans une tenue peu appropriée à la navigation au long cours…
Le déconfinement produit ses effets et nous nous préparons à repartir. Jo&Jo aura profité de cette période d’inactivité pour subir un inventaire précis et un rangement adapté dans les nombreux coffres, le tout suivi dans un fichier Excel pour une maintenance plus aisée. C’est aussi l’occasion de recenser tous les éléments à compléter lors de notre passage à Papeete. Les pièces détachées restent un vrai problème et il est bon d’avoir le nécessaire de dépannage à portée de la main, et tous les outils qui vont avec.
Un grand nettoyage est également au programme, l’humidité permanente nécessitant des passages d’éponge et de chiffons très réguliers.
C’est aussi le moment de saluer nos amis de la baie d’Avea avant de les retrouver début août.
Cathy et Pierre-Charles nous invitent pour une soirée pizza dans une roulotte aménagée. La construction de leur maison a commencé, en plein week-end de l’Ascension, autant dire que cela avance moins vite qu’ils ne l’avaient prévu. Comme le disent les autochtones de tous les pays chauds et tropicaux, par un curieux atavisme largement partagé sous ces latitudes : « vous avez la montre et nous, on a le temps »…
Puis c’est au tour de nos amis Francine et Daniel de nous rendre une dernière visite avant leur retour en France. Venus passer deux mois en Polynésie, ils y seront restés plus de quatre en tout, hébergés dans un petit fare traditionnel en bois et feuilles de palmier, du restaurant « Chez Tara » juste en face de notre mouillage.
Nous aurons apprécié leur visite régulière à la nage autour du bateau et leur pourvoi en fruits et légumes au moment où le confinement nous empêchait d’aller à terre. Ils connaissent bien la Polynésie pour y être venus dans le passé et y avoir navigué sur un catamaran aux dimensions analogues au nôtre. L’occasion là encore d’échanger des impressions, des récits de voyage, des contacts pour nos futures escales aux Tuamotu.

Comme tous ceux ayant mis le pied sur Jo&Jo, ils ont respecté la tradition du livre d’or qui compte désormais 12 pages de gentils commentaires et témoignages. Nous avons reçu des nouvelles dès leur retour en France. 25 heures d’avion par Air Tahiti Nui, avion complet (où sont les consignes de distanciation ?), service minimaliste à bord, escale à Pointe à Pitre sans descendre de l’avion, déplacements limités à bord uniquement pour se rendre aux toilettes et port du masque en permanence…
Espérons que tout cela se sera assoupli pour notre voyage dans 3 mois !
Il se fait temps de quitter Huahine, pour y revenir très certainement en août.
La petite communauté de popa’a qui a habité ces lieux durant ces trois mois se retrouve pour une soirée chez Fabienne et Jean-Christophe pour fêter notre départ avant de mettre les voiles.

Un dernier coucher de soleil sur la baie d’Avea et nous préparons à partir. Tout est prêt.
Nous naviguerons de nuit, en déployant totalement la grand-voile et le génois, à moins qu’on en vienne à s’enhardir à hisser pour la première fois le code zéro, une voile plus grande qui procure une plus grande vitesse pour la remontée au vent.
La lune sera pleine, la hauteur des vagues limitée à 2 mètres et demi venant de sud. Hisse et ho !
Nous reprenons le cours de notre voyage mis entre parenthèse pour revenir aux fondamentaux qui nous ont fait venir ici : naviguer et découvrir. Et vous raconter les richesses infinies de ce pays si attachant.



























































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